L’intelligence artificielle s’invite dans le monde de l’art à Paris. Du 10 au 14 juillet 2024, l’exposition « Terra Mirabilis » à la galerie Année Zéro présente les œuvres de 24 artistes explorant les possibilités créatives de l’IA générative. Entre innovation technologique et questionnement artistique, cet événement offre un aperçu inédit de l’art à l’ère numérique. Une occasion rare d’observer comment la collaboration entre l’humain et la machine redéfinit les contours de la création artistique.
MANIFESTO
L’intelligence artificielle générative redessine le rapport de l’Homme
au monde. Elle promet de décoder des langues oubliées
et d’en inventer de nouvelles. De donner la parole aux muets
et des sens inconnus aux bien-portants qui ignorent leur infirmité.
En art comme dans d’autres domaines, elle réduit déjà
considérablement la distance qui séparait l’idée de sa réalisation.
Au point de déposséder le créateur de son geste ? De vider
l’oeuvre de sa substance ? Qui peut dire si elle plonge l’Homme
dans la misère, ou l’élève au contraire au-delà de sa condition ?
Plutôt que de faire obstacle au mouvement – irrésistible –
de la machine, nous l’avons pleinement embrassé.
Nous y avons plongé jusqu’au vertige et à l’enivrement.
Et nous avons entrevu, sous la surface, la lumière d’un nouveau monde.
Un monde jusqu’alors inaccessible et inconnu, où nous avancions
comme des aveugles tâtant les murs d’une caverne
dont nous devinions l’inexpressible immensité.
Il y a, sous la surface, un monde si vaste que quatre-vingts milliards
d’hommes ne suffiraient à le cartographier. Il y a, dans cette
cathédrale de l’imaginaire, une projection confuse et tumultueuse
de l’âme collective de l’humanité, que chacun peut explorer
sur ce vaisseau qu’est la machine.
Dans ce monde qui renferme des milliards de mondes, la sensibilité,
le goût, le flair ont encore un sens. Ils servent de boussole
au navigateur qui guide son vaisseau hors des eaux médiocres
et balisées vers lesquelles il dérive naturellement.
Il existerait donc encore un art, celui de maîtriser la trajectoire
de cette machinerie et de prendre les courants qui mènent à des
contrées merveilleuses.
C’est cet art que nous avons pratiqué. Et comme on revenait jadis
d’une terra incognita les cales remplies de denrées exotiques,
nous revenons chargés de trouvailles et d’esthétiques insoupçonnables :
des « idoles à trompe, des trônes constellés de joyaux lumineux,
des palais ouvragés » qui sont les premiers chefs-d’oeuvre
d’un royaume que l’humanité n’a encore qu’effleuré…